M. DICO, LE POU ET LE COMMISSAIRE

L'affaire commença au pays de Vocabulaire où vivait M. Dico. Dans sa cuisine, M. Dico, pour nous plaire, sans cesse inventait les mots.

Par des recettes compliquées, M. Dico, judicieusement, choisissait tous ses ingrédients : une boule de coton et un verre d’eau pour le nuage, une pointe d’ail pour la douleur, des trous, grands et petits pour le fromage, un arc-en-ciel pour les couleurs…

Tous se pressaient à sa porte, pour un baptême en quelque sorte.

Le tiroir voulait un nom commode. La nuit, pressée, voulait un nom avant l’aube. La marée voulait un nom salé. Le hareng voulait un nom glissant. La fourmi voulait un nom tout p’tit. L’éléphant voulait un nom plus grand.

Mais un jour de grand vent, un violent courant d’air entra par la fenêtre, des pots se renversèrent, des ingrédients se mélangèrent. Et pendant que M. Dico remettait en ordre ce capharnaüm, le feu brûla le contenu de la casserole. Une très mauvaise odeur emplit la cuisine, et c’est comme ça que M. Dico, sans le faire exprès, inventa les gros mots, qui s’envolèrent aussitôt.

M. Dico, très consciencieux qu'il était, dormit très mal dans la nuit qui suivit, hanté par les remords d'avoir créé les gros mots. Comme ses cauchemars lui avait fait imaginer le pire (que les gros mots se mettraient à faire de mauvais coups un peu partout) et pensant que faute avouée est à moitié pardonnée, il décida de se rendre à la police.

« Je suis le commissaire Janoir. Qu’est ce qui vous amène ?

  • Eh bien… j’ai commis un crime…
  • Comment ? un crime… chez nous… au pays de Vocabulaire ! Fichtre ! Ne bougez pas. J’ouvre le formulaire… Voilà : nom, prénom, date et lieu de naissance, qualité.
  • Dictionnaire - mais tout le monde m’appelle Dico - je ne sais pas quand je suis né car je n’avais pas encore nommé le calendrier.
  • Qualité ? Lieu de naissance ?
  • Je nomme les choses, et je n’ai jamais nommé le lieu de ma naissance.
  • … Bon… je mettrai des X dans les cases. Alors quel est ce crime ? Et quelle en est la victime ?
  • Il n’y pas de victime…
  • Comment ? Vous venez pour un crime sans victime !
  • C’est que… pas encore… enfin, je prévois.
  • Vous osez me parler de préméditation ?
  • Pardon, je ne veux pas dire que je prévois… disons que je crains. Vous voyez, c’est à cause des gros mots…
  • Des gros mots… qu’est ce que c’est ?
  • Eh bien c’est comme des repris de justice, sauf qu’ils n’ont pas encore été pris. Ils étaient enfermés dans ma tête mais peut-être à cause d’une manœuvre de diversion et une complicité extérieure, ils se sont fait la belle. Et qui sait quels méfaits peuvent être commis, car ce sont des spécialistes pour dresser les gens les uns contre les autres. Je ne veux pas qu’on m’accuse de complicité. Vous comprenez ?
  • … »

Plus M. Dico voulait justifier sa démarche, plus il se sentait mal à l’aise. Devant l’air dubitatif persistant de son interlocuteur, son visage s’était maintenant empourpré et il transpirait à grosses gouttes. Le policier repris : « Il n’y a pas là de quoi fouetter un chat et je ne vois rien de coupable à nommer même les choses désagréables. Franchement, pourquoi se mettre dans des états pareils ?

  • C’est que je pense maintenant à quelque chose : je pense que c’est une vengeance après une autre mauvaise action…
  • Vous persistez ! Ma parole, je finirai par croire que vous êtes masochiste ! Allez, videz votre sac et on n’en parle plus.
  • Bon… Alors… Eh bien…
  • Eh bien quoi ?
  • Eh bien… Il y a quelques temps, j’ai été victime d’une agression.
  • Une agression maintenant !
  • S’il vous plaît, ne m’interrompez pas, c’est assez difficile…
  • … ?
  • Oui, c’était un soir, le jour tombait et je n’y voyais plus goutte. J’avais rangé mes ustensiles et m’apprêtais à fermer mon grimoire, me passant les doigts dans la barbe, quand j’ai vu tomber au beau milieu de la page un petit point noir. J’ai soufflé dessus mais ça ne partait pas. J’ai alors pris ma plus grosse loupe, celle qui me donne un regard monstrueux, et quand j’ai vu ce que j’ai vu, je fus horrifié : c’était un animal assez moche qui d’une patte me faisait signe de m’approcher, comme s’il voulait me dire quelque chose ! Je suis allé prendre un objet que je venais de nommer : un stéthoscope. Mes oreilles à une extrémité, le pavillon à proximité de l’animal, j’en crus à peine ce que j’entendis. Il parlait ma langue ! Il exigea d’être immédiatement nommé ! Je refusai car je n’aime pas qu’on me force la main. Non mais ! Il n’avait même pas pris son ticket pour passer dans l’ordre ! Mais il menaça de remonter dans ma barbe pour me faire subir les pires sévices.

     « Mais pou… pou… pourquoi ? bredouillai-je, je n’ai pas la re… la re… la recette. Je ne sais pas si j’en ai le pou… le pou… le pouvoir.

  • Poupoupourtant il faudra bien ! Vas-y Poupou ! Tu vas gagner pour une fois ! Tiens, Poupou ça ira. Puis non… Pou ! C’est bien Pou, c’est court. Note ça. Tope-la. Et j’me casse. » Sitôt dit, sitôt fait. Il disparut en une fraction de seconde. Moi qui suis habituellement compréhensif, j’ai pensé que j’avais assez mal réagi, bâclé de travail et que ça se retournerait un jour contre moi. Raison pour laquelle je crois être victime d’une vengeance au travers de l’évasion des gros mots.
  • Je n’ai jamais entendu une histoire pareille. Mais j'y pense : vous nommez les choses, mais savez-vous les dessiner ? Un portrait-robot de cet agresseur, c’est possible ? Voici une feuille et un crayon. » Pendant quelques minutes, M. Dico dessina assez bien tout en se sentant mal à l’aise devant la réapparition graphique de son agresseur, puis il appela : « Inspecteur Javert ?

- Non, c’est Janoir, et je suis commissaire. Vous avez fini ? Montrez-moi ça.

(M. Dico tendit fébrilement le croquis à l’inspecteur…)

- … Morbleu ! Attendez-moi ici ! Et il partit dans la pièce voisine ("Allo… Chérie… est-ce que Rémi est près de toi ? Bien, peux-tu venir tout de suite avec lui. Et apporte la loupe !")

  • Qu’est-ce qui se passe inspecteur Javert ?
  • Non : commissaire. Et Janoir. Attendez, mon fils arrive. Nous allons faire une confrontation avec le portrait-robot.
  • Ah… je dessine aussi mal que ça ? Mon agresseur ne peut pas être votre fils…
  • Attendez. Voulez-vous un café ? »

Quelques minutes plus tard, un garçonnet fit son apparition dans l’embrasure de la porte. Curieusement, ses cheveux étaient cachés par une serviette, que son père ôta prestement tout en tendant la loupe vers M Dico :

« Venez voir ça…

(M. Dico examine)

  • Oui, il lui ressemble fort… mais pas tout à fait. Il doit y avoir un lien de parenté.
  • Rouletaboule, venez par ici, c’est urgent !

(Un inspecteur entre, tout essoufflé)

  • Commissaire ! Il y a plein de monde qui…
  • Ça peut attendre. Il faut diffuser ce portrait-robot dans tout le canton ! Et faites savoir qu’ils sont peut-être plusieurs individus à lui ressembler.
  • Oui commissaire mais… tous ces gens… ils veulent déposer plainte ! Le pharmacien les accompagne et il dit avoir déjà vu un des suspects !
  • Bon, faites entrer le pharmacien, mais diffusez quand même le portrait-robot. Rémi, tu peux partir, et dit à ta mère que je rentrerai tard. »

Le pharmacien entre. Il a un aspect sévère et le crâne désertique.

« Bonjour Monsieur, lui dit Janoir. Vous êtes donc pharmacien et désirez apporter votre témoignage… Monsieur… vous m’entendez ?

  • Pardon, oui, je suis Ambroise de Saint-Thôle. Eh… Bonjour Monsieur Dico, vous êtes venu témoigner aussi ? Je regardais ce portrait affiché : M. le commissaire, si c’est votre suspect, eh bien je le connais… ou je connais au moins sa famille. Ils se ressemblent tous. C’est la famille Pou.
  • Poux avec un X, précise M. Dico.
  • Et j’ajoute qu’ils son nombreux : j’ai vu défiler une trentaine d’enfants hier dans mon officine, pour autant d’agressions, et ce sont tous leurs parents qui sont ici pour déposer plainte. Je suis en quelque sorte leur porte-parole.
  • Et voilà, marmonna M. Dico, c’est ce que je pressentais, c’est de ma faute. »

Aïe ! pensa le commissaire, moi qui pensais regarder tranquillement ce soir un épisode de Capitaine Merlot… « Bon, on va faire simple : je prends uniquement votre témoignage et je vous charge de les rassurer tous quant à la résolution rapide de cette affaire. "

Ce soir-là, le commissaire ne comprit rien à l’intrigue de sa série préférée, absorbé par la façon dont il devrait mener sa propre enquête. Et la nuit fut longue pour chacun : Ambroise de Saint-Thôle fit un cauchemar dans lequel il était un indien formateur en pratique de scalp, M. Dico devait écrire une punition qui lui faisait remplir des pages et des pages du même mot de trois lettres.

Le lendemain matin, c’est un appel téléphonique du pharmacien qui interrompit le petit déjeuner du commissaire :

« Pardon de vous déranger à cette heure, mais je crois important de vous dire qu’un nouveau cas s’est présenté à moi hier alors que j’allais fermer et…

  • Eh bien, ça ne fait qu’une victime de plus…
  • … sauf que là c’est un adulte, une dame à qui j’ai conseillé de venir vous voir dès ce matin.
  • Ah… Bien vu. Il faut faire vite. »

 

Cette personne attendait l’arrivée du commissaire et reconnut elle aussi la bestiole du portrait-robot.

« Je prends donc votre témoignage : Nom, prénom, date et lieu de naissance, qualité.

             - Marie, Rose, née le dix-huit février mil neuf cent soixante-quatorze à Tourcoing, maîtresse d’école.

  • Votre nom ? Marie-Rose comment ?
  • Mon nom c’est Marie et mon prénom Rose. J’ai vu le pharmacien hier soir et il m’a dit que j’étais moi aussi victime d’un pou. Je ne savais pas que les adultes pouvaient être victimes des poux…
  • Je ne le savais pas non plus. Rouletaboule… venez par ici. Il faut appeler l’académie et les services de santé !

(Rouletaboule entre, tout essoufflé) :

  • Commissaire ! Il y a plein de monde qui…
  • Ça peut attendre. Il faut transmettre le portrait robot à l’académie et aux services de santé ! Cette personne a été agressée par ce fameux Pou.
  • Oui commissaire mais… tous ces gens… ils veulent déposer plainte ! Ils disent être victimes du Pou !
  • Bon… Bien… On prévient le procureur… La préfecture… Tout le monde ! Non… pas les journalistes…
  • Mais, commissaire, ils sont là aussi ! »

Le lendemain, les journaux titraient " Un parasite attaque la France "  ou encore " Nouvelle menace venue de l’étranger " …

Tout le personnel du commissariat devait être sur le pont pour prendre les témoignages. La journée fut longue et des directives arrivèrent rapidement des préfectures. Il fallait faire la lumière sur l’origine du mal.

Des dossiers poussiéreux furent extraits des archives, des appels téléphoniques furent passés à d’anciennes pointures de la police. On disait que des actions similaires étaient tenues par tous les services de santé. S’il avait pu, Janoir aurait même voulu joindre les brigades grâce auxquelles il avait toujours voulu entrer dans la police, c’est-à-dire celles du Tigre, ces brigades de Clémenceau dont la réputation avait pimenté les soirées télé de son adolescence. Mais le téléphone aurait eu beau sonner, il n’y avait plus d’abonné…

Son téléphone à lui sonna et il apprit que le lendemain le chef de l’État ferait une déclaration.

À l’heure dite, tous les écrans étaient allumés, toutes les oreilles collées aux radios :

En préambule à l'allocution, le journaliste dit de façon atone « La France à peur ». Puis apparut le président dont le visage reflétait la fatigue. Le ton fut grave pour dire que les autorités ne déroberaient pas à leurs responsabilités… qu’il ne fallait pas s’inquiéter… que tout serait bientôt sous contrôle… surtout, ne pas céder à la panique. Les précautions à prendre furent énumérées, ainsi que les accessoires de protection dont il fut dit qu’ils seraient bientôt disponibles en nombre.

Surtout, le mot était lâché, qui résonnerait dans les esprits jusqu’au lendemain : pas de panique… panique… panique. Les yeux des téléspectateurs étaient écarquillés. Les auditeurs étaient abasourdis.

Les commerçants virent bientôt leurs rayons se vider. Se vider de tout ce qui n’avait pas été énuméré. Allez savoir pourquoi ; un réflexe archaïque animal ? De la farine, alors que les champs de blé donnaient bien. Du sucre, alors que ni les betteraves ni la canne ne manquaient. Des aliments en boîtes, alors que nous n’étions pas assiégés. Du savon, du papier toilette afin de mourir dignement. Faire le plein, tant qu’on le pouvait, et le plein d’informations pour alimenter les conversations. Il se passait enfin quelque chose, ici ! Quelque chose qui nous faisait peur, à nous ! Habituellement, quand c’est triste, c’est loin, donc c’est un peu moins grave...

Et ce pauvre M. Dico dans son fauteuil devant sa télé, de se lamenter « C’est de ma faute. C’est de ma faute. »

Les poux se multipliaient. Les éditions spéciales se multiplièrent.

Le commissaire Janoir recevait chaque jour des dizaines de lettres anonymes de dénonciations entre voisins dont la peur, la jalousie et la colère étaient exacerbées par la publication quotidienne de statistiques effroyables sur la progression de ce nouveau mal qu’on appela poudémie.

Les documentaires télévisés consacrés aux insectes furent interdits aux enfants afin d’éviter la panique… panique… panique. Les adultes se chargeant bien eux-mêmes de ne pas paniquer… paniquer… paniquer.

On vit fleurir de nouvelles lois, contredites aussitôt par des spécialistes nouvellement autoproclamés. En attendant la panacée qui ferait rentrer tout le monde dans le rang, il était décidé de réquisitionner des locaux afin que, réquisitionnés eux aussi, les coiffeurs, les barbiers, les toiletteurs de chiens et autres tondeurs de moutons pourraient s’en donner à cœur joie, payés par les bénéficiaires volontaires et applaudis chaque soir à 20 heures pour leur effort de guerre. (On dit que des concours de vitesse furent organisés.) Certaines personnes étaient réticentes à payer la prestation et organisaient entre elles des apérotontes ; quelques semaines plus tard, des déchets capillaires commençaient à s’échouer sur les plages…

On pensa annuler l’élection de Miss France mais on maintint l’opération qui se présentait sous un jour nouveau.

Bientôt une crise de l’emploi s’installa dans le pays. En effet, tous les chômeurs étaient sollicités car, outre les professions déjà citées, des besoins urgents se faisaient sentir pour fabriquer et distribuer. Chez les chapeliers, les modistes, les perruquiers et chez les fabricants de charlottes (accessoires rendus obligatoires par les autorités pour qui refusait la tonte). Les tatoueurs n’étaient pas en reste pour être formés et embauchés ; il y avait tant de surfaces nouvellement défrichées… Plus tard, c'est le port du casque,   intégral et homologué, qui deviendrait obligatoire dans les lieux publiques.

Après d’âpres négociations avec le gouvernement et les parcs zoologiques, les écologistes obtinrent que de nombreux singes soient déconfinés afin de procéder à une méthode naturelle d’épouillage sur les volontaires. Des trains Ouipou et des autocars Flexpuce furent aménagés pour le transport des primates vers les zones de combat qu’étaient les jardins publics. En effet, les primates devaient se sentir à l’aise dans les arbres pour être efficaces. Les bénéficiaires sujets au vertige étaient montés à l’aide de nacelles à proximité des animaux, les autres grimpaient le plus vite possible avec les commentaires de Guy Luxueux et sa copine Simone et sous les applaudissements de la foule en délire.

Les réfractaires organisèrent sous le surnom de poilus des manifestations soutenues notamment par le chanteur Antoine et par le professeur Raoul, sommité en la matière. Des contre-manifestants donnaient crânement de la voix, arborant des effigies de Marie-Rose Elmac, François l’Anglais et Louis Beau-Daim. (Il faut dire que la cote de ces trois-là avait monté en flèche, si bien qu’il furent accusés pendant un temps du délit d’initié.) Des affrontements entre les deux groupes eurent lieu place de la Contrescalpe. Les poilus perdirent la bataille car ils n’avaient pas de prise sur leurs adversaires. Les chaînes de télévisions diffusaient en continu des images choquantes des affrontements. On y voyait des jets de bombes insecticides. Certaines femmes, accusées d’intelligence avec le Pou, étaient tondues en public, sous les hourrah de la foule. Infiltrés parmi les manifestants de tout poil, des blagues-boys lançaient des Apéricubes vers les forces de l’ordre dont les membres avaient pour consigne d’agir en toute conscience, s’obligeant à ôter leurs gants pour ouvrir les précieux cubes et profiter entre eux des devinettes de la Vache qui rit, pendant que les hordes les dépassaient pour se ruer vers les ministères. M. Dico pleurait maintenant devant son poste : « C’est de ma faute… c’est de ma faute… »

Au même moment, les mêmes images passaient sur la télé que Janoir s’était fait installer au commissariat. Au coin de l’image figurait en permanence la mention " Je télécharge ContrePou ". Rompu de fatigue, il s’endormit. Il rêva cette nuit-là qu’il avait été rétrogradé, posté sur les quais du métro pour contrôler le port des charlottes, puis poursuivi par les poilus enragés. « Au secours ! Au secours ! Non ! J’ai une famille ! » Et on le secouait… On le secouait encore…

«  Chéri… Chéri… réveille-toi… tu vas être en retard…

  • Oh… ma chérie… si tu savais… ce n’était pas vrai… quelle nuit ! Et ce rêve… quelle histoire !
  • Je vois, tu as dû faire un sacré cauchemar. Je vais préparer le café ; tu en auras sûrement besoin.
  • Ouf… Oui. Je te raconterai tout ça ce soir. »

Ce matin-là, malgré le mauvais sommeil de la nuit, le commissaire Janoir se sentait bien. Bien sûr, toute cette histoire était inconcevable et il pensa qu’il ne s’était pas senti aussi bien depuis longtemps. Il avait décidé de se rendre au commissariat à pied.  L’air était un peu frais, mais c’était celui du printemps. Les feuilles des platanes à contre-jour faisaient clignoter la lumière du soleil. Quelques passereaux coloraient de leurs cris l’univers sonore d’un beau matin. Arrivé dans son cher commissariat, d’humeur légère, il s’assit à son bureau, poussa un long soupir mêlé de soulagement et de bien-être. Il appela : « Rouletaboule, rien de spécial ce matin ?

  • Non Commissaire, juste un monsieur qui et venu. Il voulait vous voir en personne. Mais il était bizarre. Il parlait d’un crime qu’il aurait commis ; mais je crois que ça n’est pas sérieux. Il a dit qu’il reviendrait. Attendez… j’ai noté son nom… Il dit que tout le monde l’appelle M. Dico… Monsieur le commissaire ? Vous repartez déjà ? Monsieur le commissaire ? Où allez-vous ? Monsieur le commissaire ? Revenez Monsieur le commissaire !… »