Crépuscule sur l'étang

CRÉPUSCULE SUR L'ÉTANG   

 
Les baigneurs ont brisé en un puzzle géant

le reflet du soleil en mille éclats d’argent.

Après les jeux d’enfants, éclaboussant de cris,

et tant et tant de bruits faisant cacophonie,

il est l’heure, il est temps, que la nature efface

de ces jeux, ces affronts, patiemment toute trace.

 

Voici venir le calme, la quiétude, le mystère.

Chaque chose prend sa place pour ce jour à l’envers.

Après maintes batailles, le moment vient enfin

où l’ombre et la clarté vont se donner la main,

aux rideaux des humains qui allument des lumières,

décorant de guirlandes tout le tour de la Terre.

 

Alors qu’il a sombré par delà les roseaux,

l’astre du jour enflamme les nuages les plus hauts

qui éclairent un instant à la frontière de l’eau

le visage mouvant de la fille du Chaos.

 

Que j’aime ce mariage du jour et de la nuit,

du chien et de la louve, du blanc et puis du gris,

donnant naissance enfin à cette heure métisse,

dont je suis le témoin, à défaut de complice.

 

La lune se mire déjà dans la surface ovale,

comme dans sa psyché, veillant à son teint pâle.

Le magicien du monde a réussi son tour :

voici la nuit qui tombe, et qui mange le jour.